Doctoral thesis (Dissertations and theses)
Etude épidémiologique et moléculaire de la dyskinésie ciliaire chez le chien
Merveille, Anne-Christine
2015
 

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Keywords :
Dyskinésie ciliaire primaire; génétique; canine
Abstract :
[fr] Les dyskinésies ciliaires primaires (DCP) sont des maladies génétiques rares regroupant des pathologies respiratoires liées à une anomalie constitutionnelle des cils dits “mobiles” (Leigh, 2006). Ces cils jouent un rôle important dans l’organisme, notamment au niveau du tractus respiratoire, où ils entrent dans la composition de l’escalator mucociliaire. Ils jouent également un rôle au niveau du système reproducteur et durant l’embryogénèse. Chez l’homme, la prévalence des DCP est estimée à 1 :10.000 (Afzelius et Stenram, 2006). Chez le chien, il existe une trentaine de cas décrits dans la littérature dans 20 races différentes. Les deux espèces partagent des manifestations cliniques similaires, directement liées à la dysfonction de la mobilité ciliaire. La plupart des individus touchés présentent des signes dès leur plus jeune âge. Parmi ces signes, on retrouve une atteinte des voies respiratoires comprenant des infections récidivantes des voies hautes (rhino-sinusites) et basses (bronchites et bronchopneumonies qui mènent à de la bronchiectasie), mais aussi de l’infertilité et, dans la moitié des cas environ, des défauts de latéralité que l’on appelle situs inversus (Leigh, 2006). La structure des cils mobiles est hautement conservée entre les différentes espèces et se caractérise par un agencement de neuf paires de microtubules périphériques organisées autour d’une paire centrale de microtubules. A cette structure, se rajoutent des complexes protéiques qui permettent de stabiliser les différents composants comme les crêtes radiales ou le complexe régulateur des dynéines, mais aussi des protéines motrices qui permettent au cil de se mouvoir comme les bras de dynéine. Cet agencement est perturbé dans la grande majorité des DCP qui présentent différents types de défauts ultrastructuraux en fonction des différents gènes impliqués (Papon et al., 2010) (Jorissen et al., 2000b). Chez l’homme, comme chez le chien, le défaut ultrastructurel le plus fréquent est une atteinte des bras de dynéine externes. La plupart des DCP se transmettent selon un mode autosomique récessif et plusieurs gènes causals ont été identifiés (Zariwala et al., 2011). Toutefois, les bases moléculaires d’un certain nombre de cas chez l’homme restent à ce jour indéterminées et chez le chien aucun gène responsable n’avait été identifié avant cette présente étude. Le chien représente un modèle spontané de DCP qui pourrait être utile dans la découverte de nouveaux gènes impliqués dans cette pathologie. Les différents objectifs de ce travail étaient d’une part, d’étudier le phénotype clinique d’une DCP ségrégant au sein d’une race de chien, le bobtail, et d’autre part, d’identifier le mode de transmission génétique ainsi que les bases moléculaires de cette DCP. Nous avons également voulu étudier la fréquence de la mutation identifiée dans cette race. Une fois le gène identifié chez le bobtail, nous avons voulu déterminer si celui-ci pouvait être responsable de cas de DCP humaines présentant un phénotype ultrastructurel similaire à celui des bobtails atteints. Ensuite, nous avons voulu évaluer les conséquences qu’une dysfonction de ce gène pouvait entraîner, afin de gagner en compréhension sur le rôle de la protéine impliquée et pour confirmer que les mutations identifiées étaient bien à l’origine du phénotype clinique observé. Enfin, nous avons voulu déterminer si ce gène pouvait être impliqué dans d’autres ciliopathies. Nous avons tout d’abord obtenu des données cliniques sur une dizaine de chiens atteints. Tous appartenaient au même pedigree et présentaient un phénotype clinique caractéristique apparu très tôt dans la vie de l’animal. Ce phénotype se caractérisait par un jetage nasal bilatéral, une toux productive, une leucocytose neutrophilique et des infections respiratoires récurrentes dont les séquelles étaient visibles sur les radiographies thoraciques avec des lésions de bronchopneumonie touchant les lobes crâniaux et moyen droit ainsi que des lésions de bronchiectasie. L’analyse du sperme d’un de ses chiens mettait en évidence une réduction de la mobilité des spermatozoïdes et un pourcentage important de formes anormales en microscopie optique. Un situs inversus était également présent dans environ un tiers des cas. Les anomalies ciliaires observées en microscopie électronique chez ces chiens révélaient un phénotype ultrastructurel peu commun, associant une atteinte des bras de dynéine internes et des anomalies de la paire centrale de microtubules. L’analyse du pédigree de ces chiens était en faveur d’un mode de transmission autosomique récessif. L’étude d’association génome entier réalisée chez 5 atteints et 15 contrôles a permis d’identifier une région contenant 151 gènes candidats. Une sélection des gènes décrits comme impliqués dans la structure et/ou la fonction des cils (Gherman et al., 2006; Inglis et al., 2006) a permis une réduction drastique des gènes candidats. Le séquençage de ceux-ci a permis d’identifier un codon stop prématuré au sein de CCDC39, un gène codant pour une protéine enrichie en domaine « coiled-coils ». Tous les chiens atteints possédaient cette mutation à l’état homozygote tandis que leurs parents étaient tous hétérozygotes, confirmant ainsi le mode de transmission autosomique récessif. Après avoir mis au point un test génétique rapide basé sur la technologie Taqman, plus de 500 bobtails ont été génotypés afin d’estimer la fréquence de la mutation au sein de cette race. L’allèle muté se retrouvait plus fréquemment dans la population européenne avec une fréquence d’hétérozygotes autour de 19%. Les hétérozygotes étaient plus rares chez les chiens provenant d’Amérique du nord avec une fréquence d’hétérozygotes de 7%. Plusieurs éléments étaient en faveur du fait que cette mutation était bien la mutation causale. Premièrement, le séquençage d’une population de 80 chiens issus de 9 races différentes, n’a pas permis d’identifier une seule fois cette mutation. De plus, en étudiant l’expression de CCDC39 au sein de l’épithélium respiratoire de chiens porteurs, nous avons mis en évidence un phénomène de dégradation de l’ARNm non-sens. Une nette diminution de l’expression de CCDC39 était visible chez les atteints par rapport aux sains et la protéine était absente des cellules ciliées respiratoires des atteints, contrairement aux chiens contrôles. Nous avons également pu démontrer que CCDC39 était principalement exprimé dans les tissus ciliés chez la souris et chez l’homme. Enfin, pour confirmer définitivement que CCDC39 joue un rôle important dans la mobilité ciliaire, nous avons supprimé son expression à l’aide de morpholinos dans des embryons de zebrafish. L’injection provoquait l’apparition de défauts de latéralité, dose-dépendants. Ce phénotype était spécifique car il disparaissait lorsque les embryons étaient co-injectés avec de l’ARNm sauvage. Vu son implication dans une DCP canine, il était légitime de suspecter que CCDC39 pouvait être à l’origine de cas humains. Nous avons sélectionné une cinquantaine de patients présentant un phénotype ultrastruturel identique à ceux des bobtails atteints. Le séquençage de ces patients a permis d’identifier quinze mutations différentes. Chez la plupart des atteints, ces mutations étaient, soit à l’état homozygote, soit à l’état d’hétérozygote composite. Par contre, nous n’avons pas mis en évidence de mutation au sein de CCDC39 pour une vingtaine de patients atteints de DCP avec un phénotype ultrastructurel différent ou chez plus de 200 patients ne présentant que des défauts de latéralité. Afin de mieux comprendre la fonction de CCDC39 et l’impact de sa dysfonction sur la structure cilaire, nous avons analysé son expression au niveau protéique, en examinant des cellules épithéliales nasales prélevées par frottis brosse. Comme chez le chien, la protéine était absente des cellules épithéliales respiratoires des patients atteints, alors qu’elle était présente chez les contrôles. En utilisant des techniques d’immunofluorescence à haute résolution, nous avons pu démontrer que CCDC39 se localisait principalement au niveau de l’axonème ciliaire chez l’individu sain mais pas chez l’individu atteint. Afin de caractériser l’impact d’une déficience de CCDC39, nous avons étudié les autres composants de l’axonème ciliaire en utilisant des anticorps dirigés spécifiquement sur des sous-unités de l’axonème ciliaire. Nous avons ainsi pu démontrer que l’absence de CCDC39 est responsable d’une absence de certains constituants axonémaux comme les bras de dynéine internes ou le complexe régulateur des dynéines. Enfin, l’analyse du battement ciliaire de certains sujets atteints a permis de mettre en évidence un pattern dyskinétique, caractérisé par une amplitude réduite et des axonèmes rigides. Cette étude a permis d’identifier un nouveau gène impliqué dans les DCP tant dans la race bobtail que chez l’homme. Nous avons pu mettre en évidence que ce gène code pour une protéine axonémale dont l’absence est responsable d’une atteinte des bras de dynéine internes et d’une désorganisation axonémale, ce qui a pour conséquence un battement ciliaire dyskinétique. Le phénotype clinique présenté par les chiens atteints est remarquablement similaire à celui de l’homme, avec une atteinte sévère des voies respiratoires, mais également des anomalies spermatiques chez le mâle et l’existence de défaut de latéralité chez certains atteints. Comme dans la grande majorité des DCP, les individus ne présentent la maladie que s’ils recoivent deux copies défectueuses de CCDC39, puisque nous avons pu montré que tous les chiens atteints étaient homozygotes pour la mutation et que la plupart des patients humains atteints possédaient soit une mutation à l’état homozygote, soit deux mutations différentes. Toutes les mutations identifiées au sein de ce gène sont associées à une perte de fonction et sont vraisemblablement responsables d’une absence de production de la protéine, secondaire à un phénomène de dégradation de l’ARNm, comme nous avons pu le mettre en évidence chez le bobtail. Par la suite, d’autres études ont confirmé cette hypothèse en identifiant de nouvelles mutations au sein de CCDC39, pratiquement toutes liées à une perte de fonction (Blanchon et al., 2012) (Zariwala et al., 2013) (Antony et al., 2013). Les mutations identifiées étaient systématiquement associées à un phénotype ultrastructurel bien particulier représentant environ 12% des cas de DCP (Jorissen et al., 2000b) (Chilvers et al., 2003a) (Papon et al., 2010) (Shoemark et al., 2012). Simultaménent à la découverte de CCDC39, un autre gène, CCDC40, a été identifié comme étant responsable d’un phénotype ultrastrucurel identique. Ces deux gènes sont étroitement liés, puisque l’absence de CCDC40 affecte la localisation axonémale de CCDC39 au sein de la cellule ciliée (Becker-Heck et al., 2010). Ces deux gènes expliquent à eux seuls une grande proportion des patients présentant ce phénotype particulier (Blanchon et al., 2012) (Antony et al., 2013). Nous avons pu démontrer, par différentes méthodes, que ce gène jouait un rôle important dans la structure et la fonction des cils mobiles en observant que son expression était principalement localisée dans les organes présentant des cils mobiles et que la protéine était absente chez des individus porteurs de mutation. De plus, en inactivant l’expression de ce gène dans des embryons de zebrafish, nous avons observé l’apparition de défaut de latéralité ce qui suggère une atteinte des cils mobiles de la vésicule de Kupffer, responsable de l’asymétrie droite gauche. L’identification de ce gène est particulièrement intéressante car CCDC39 a été la première protéine enrichie en domaine « coiled-coils » a être impliquée dans une DCP et a permis de souligner l’importance de ces motifs pour la fonction du cil mobile. Depuis lors, plusieurs autres gènes possédant ces structures particulières ont été associés avec d’autres cas de DCP humaines (Becker-Heck et al., 2010) (Hjeij et al., 2014) (Horani et al., 2013a) (Knowles et al., 2013a) (Panizzi et al., 2012) (Wirschell et al., 2013). Le rôle exact de ces protéines riches en des domaines « coiled-coils » reste à préciser, mais elles semblent jouer un rôle dans la structure du complexe régulateur des dynéines et dans l’ancrage des bras de dynéine aux microtubules adjacents. Cette étude a permis d’identifier le premier gène responsable de DCP dans l’espèce canine. Le génotypage de plus 500 bobtails a permis d’établir que la mutation semble plus fréquente en Europe, ce qui pourrait être lié à l’usage intensif de certains grands champions dans les années 80. La disponibilité de ce test permettra aux éleveurs de dépister les porteurs asymptomatiques et évitera l’apparition de nouveaux atteints. Enfin, cette étude permet de mettre en lumière l’intérêt du chien en tant qu’organisme modèle pour identifier les origines génétiques de certaines pathologies humaines. En effet, le chien représente un modèle unique à bien des égards (Lequarré et al., 2011). Le chien bénéficie de soins médicaux de plus en plus poussés et chaque race de chien représente un isolat génétique, ce qui a pour conséquence une concentration de certains allèles morbides responsables de pathologies similaires à celles de l’homme. On peut ajouter que le chien possède un répertoire génétique très proche de celui de l’homme et que la strucure de son génome est particulièrement intéressante pour disséquer génétiquement des caractères mendéliens, mais aussi des caractères complexes (Lindblad-Toh et al., 2005). Enfin, ou peut imaginer que les bobtails atteints de DCP pourraient représenter une opportunité unique pour tester de nouvelles thérapies et éventuellement pour mettre au point une thérapie ciblée contre le défaut génétique responsable.
Disciplines :
Veterinary medicine & animal health
Author, co-author :
Merveille, Anne-Christine  ;  Université de Liège > Dép. clinique des animaux de compagnie et des équidés (DCA) > Pathologie médicale des petits animaux
Language :
French
Title :
Etude épidémiologique et moléculaire de la dyskinésie ciliaire chez le chien
Defense date :
27 April 2015
Number of pages :
185
Institution :
ULiège - Université de Liège
Degree :
Docteur en sciences vétérinaires
Promotor :
Lequarré, Anne-Sophie ;  Université de Liège - ULiège > Département d'Enseignement et de Clinique des animaux de Compagnie (DCC) > Médecine interne des animaux de compagnie
Clercx, Cécile  ;  Université de Liège - ULiège > Département d'Enseignement et de Clinique des animaux de Compagnie (DCC) > Médecine interne des animaux de compagnie
Jury member :
Bours, Vincent ;  Centre Hospitalier Universitaire de Liège - CHU > Service de génétique
LEFEBVRE, Philippe ;  Centre Hospitalier Universitaire de Liège - CHU > Service d'ORL, d'audiophonologie et de chir. cervico-faciale
Detilleux, Johann ;  Université de Liège - ULiège > Département de gestion vétérinaire des Ressources Animales (DRA)
Peeters, Dominique ;  Université de Liège - ULiège > Département d'Enseignement et de Clinique des animaux de Compagnie (DCC) > Médecine interne des animaux de compagnie
André, Catherine
Cadoré, Jean-Luc
Name of the research project :
Projet LUPA
Funders :
FRIA - Fonds pour la Formation à la Recherche dans l'Industrie et dans l'Agriculture [BE]
Available on ORBi :
since 28 April 2015

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