[fr] Au sein du néokantisme de Bade qui exerce une forte influence sur la scène philosophique allemande du tournant du XXe siècle, la position d’Emil Lask présente un caractère profondément original en ceci qu’elle introduit l’hypothèse que la sphère du sens, loin d’être exclusivement formelle, est toujours une interpénétration de forme et de matière, son matériau restant toujours impénétrable à la forme. Lask accorde de fait toute attention, dans La logique de la philosophie et la doctrine des catégories, à ce qu’il caractérise comme « ce qui n’est que matériau, matériau originaire, matériau premier, simple “substrat” (Stoff), simple “matière”, “proté hylé” ». De là, il est tentant de déduire qu’il accorde une place de choix à qu’il appelle lui-même la « donnée » (Gegebenheit) du « matériau irrationnel ».
C’est cette hypothèse que nous souhaitons examiner en accordant une attention toute particulière au « lexique » déployé par Lask pour caractériser ce matériau. Il est notable que le philosophe distingue soigneusement les concepts d’ « alogique » (alogisch), de « logiquement nu » (logisch-nackt) et d’ « irrationnel » (irrational) dans son œuvre. Lask soutient en effet que peut être considéré comme un « matériau logiquement nu », non pas seulement le sensible (matériau alogique), mais aussi toute forme qui prend la fonction de « matière » sous une catégorie réflexive. En conséquence, il est conduit à qualifier du nom de « matière » un matériau suprasensible. C’est ce mouvement que nous analyserons, notamment pour examiner s’il suffit qu’un matériau soit « logiquement nu » pour être considéré comme « donné ».
Disciplines :
Philosophy & ethics
Author, co-author :
Gauvry, Charlotte ; Université de Liège - ULiège > Département de philosophie > Phénoménologies
Language :
French
Title :
Donné sensible et donné non-sensible chez Emil Lask : l’“alogique”, le “logiquement nu” et l’“irrationnel”